Le podcast- 9 : De la Ciotat à Los Santos – partie 1

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Quels sont les liens entre le cinéma et le monde du jeu vidéo ? Un sujet tellement vaste que notre émission sera coupée en deux parties… Pour nous aider à voir plus clair dans ce bazar, nous accueillons Stéphane Moïssakis du magazine Capture Mag.

Retrouvez la seconde partie de l’émission ici : De la Ciotat à Los Santos – partie 2

Le Cinéma et le jeu vidéo, c’est une vieille histoire qui remonte aux origines de ce dernier, et qui aujourd’hui nous paraît parfaitement évidente. Pourtant, le jeu vidéo n’était pas forcément amené à croiser le chemin du cinéma. On était plutôt en présence d’une évolution du jouet dans un domaine électronique, mais aussi l’avenir des flippers et des machines à sous.
Le jeu vidéo naissant s’est bien sûr inspiré des règles mises en place par le cinéma, qui avait déjà une bonne centaine d’années d’expérience et partage avec lui l’écran comme lien avec son public. Au delà de l’inspiration, c’est une véritable interpénétration qui a eu lieu au cours des années. Mais ces deux médias sont-ils si proches que cela ? En effet, outre le problème passif/actif, le jeu vidéo se définit par le gameplay : la façon dont le joueur peut interagir avec l’œuvre, ses libertés et ses contraintes, là où le cinéma agit à travers d’autres mécanismes comme le montage. De plus le jeu vidéo a des ponts vers d’autres domaines : le jeu de société, le sport, et même vers la musique et sa pratique qui se rapproche beaucoup de l’expérience de jeu.
Autant dire que le sujet est vaste, tellement vaste que la durée initiale de cette émission approche les 4 heures (dont au moins une heure entièrement sur GTA…)… C’est pourquoi nous avons décidé de la couper en deux parties. Dans cette première partie, il est question du jeu vidéo qui se nourrit du cinéma. Dans la deuxième partie, on prendra le problème à l’envers en parlant du cinéma qui se nourrit du jeu vidéo.

Le jeu vidéo se nourrit du cinéma :

L’évolution technologique des consoles à permis aux jeux vidéo d’émuler de plus en plus les standards du cinéma. Avec l’arrivée du CD-ROM, vers la fin des années 80, le jeu vidéo n’était plus limité par le stockage. On peut désormais inclure des fichiers audio (ost et doublages) et vidéo (en CGI ou en prises de vue réelles) en plus des sons et animations générés par le programme. Un jeu comme Rebel Assault, qui reprenait les thèmes musicaux orchestrés de John Williams et toute l’imagerie Star Wars fut un véritable produit d’appel pour le CD-ROM. Le phénomène ne s’est pas limité au PC puisque SEGA sortira au début des années 90 son Mega CD, proposant un bon nombre de jeux en Full Motion Video (FMV)

jeux en Full Motion Video du Mega CD

L’augmentation de la puissance des machines implique aussi une augmentation de la qualité : de meilleurs graphismes, de la capture de mouvements, des cinématiques de plus en plus belles… On en arrive à un point où certains jeux sont vendus presque exclusivement sur la beauté de leurs cinématiques ou sur leur scénario. C’est le cas de Final Fantasy 7 (dont nous avons longuement parlé dans un épisode du Ciné-club de M. bobine), dont les publicités ne contenaient pas d’image de gameplay :

Publicité US de Final Fantasy VII mettant l’accent sur les moyens colossaux mis en œuvre

La Pub FR  de FF VII qui met en avant les qualités narratives du jeu

On remarque aussi que les doublages des jeux vidéo sont eux aussi réalisés avec plus de sérieux. Les horreurs que l’on a pu rencontrer sur la version française de MGS, Symphony of the Night, ou le premier Resident Evil sont (en théorie) amenées à être de plus en plus marginales. Certains éditeurs n’hésitent pas à faire appel à des acteurs de cinéma, comme ce fut le cas sur la saga Kingdom Hearts ou encore The Nomad Soul pour lequel David Bowie prête sa voix, son image et compose aussi quelques chansons :

L’on est arrivé à un point ou les échanges entre le monde du jeu vidéo et le cinéma ne se font plus dans un seul sens : par exemple, la performance Capture développée par Robert Zemeckis, puis par James Cameron est un héritage du jeu vidéo. Un autre exemple : Michael Giacchino à commencé sa carrière dans le jeu vidéo et il est désormais l’un des plus grands compositeurs en activité pour le cinéma.
Sur le plan artistique, certains jeux revendiquent ouvertement leur parenté avec le cinéma. C’est le cas de la série des Resident Evil, un jeu qui s’inspire d’un genre jusqu’à lors réservé au cinéma : le film de zombies. Le jeu proposant des décors précalculés, à la manière de son aîné : Alone In The Dark, les angles de caméras sont très cinématographiques, et l’un des passages de jeu le plus célèbre, l’apparition du premier zombie, se fera par le biais d’une séquence cinématique.

Comment est écrit un scénario de jeu vidéo ? L’écriture est-elle linéaire ? Non linéaire ? Comment est-on impliqué émotionnellement dans un jeu ? Comment l’on s’identifie à un personnage que l’on contrôle ? Quels sont les mécanismes à l’œuvre dans les deux médias pour permettre la suspension volontaire de l’incrédulité ? Pour tenter de répondre à ces questions, notre point de départ sera une figure commune aux deux médias : la caméra subjective. Au cinéma, ce n’est pas parce qu’on adopte un point de vue subjectif d’un personnage que l’on va ressentir ses émotions. On ne s’identifie pas au requin dans Les Dents de la Mer, contrairement à ce qu’en pense Serge Daney (qui ne parle même pas d’identification mais de point de vue du chasseur et du chassé) ni au tueur dans la séquence d’ouverture d’Halloween :

Un gros plan sur un visage sera plus immédiatement identificateur qu’une caméra subjective. Quand bien même il existe des films entièrement en caméra subjective, l’on reste dans le domaine de l’expérimentation avec des résultats pas toujours convaincants. A l’inverse, un jeu entier en caméra subjective ne nuira pas à l’immersion dans une œuvre, au contraire. Est-il nécessaire de s’identifier à un personnage pour s’immerger dans un jeu vidéo ? A priori non, sinon ni Doom ni Tetris n’aurait eut le succès qu’on leur connaît. Si certains genre du jeux vidéos sont de plus en plus narratifs, au point d’emprunter des codes d’écriture ou de mise en scène au cinéma, c’est avant tout un art du gameplay.

Shining : the Holy Ark Doom Shadowgates

Shining The Holy Ark, Doom ou Shadowgates, des exemples de jeux à la première personne

Fin de la première partie

On en profite pour dire un grand merci à Stéphane Moïssakis qui a partagé avec nous son érudition et sa passion sur un sujet qui n’est pas souvent traité avec autant de sérieux : le jeu vidéo. On se retrouve dans quelques jours pour la seconde partie de ce Cinéphylis.

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